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La rupture conventionnelle, un piège pour les salariés

La rupture conventionnelle semble ne présenter que des avantages pour le salariés :

– un mode « neutre » de rupture puisqu’un motif n’est pas nécessaire

– la possibilité de bénéficier de l’assurance chômage (ce que ne permet pas la démission)

 

Pour plus de détail sur les modalités de conclusion d’une rupture conventionnelle : voir « comment conclure une rupture conventionnelle ».

 

Sauf que … la rupture conventionnelle régulièrement conclue interdit au salarié de contester la rupture de son contrat de travail devant le conseil de prud’hommes !

Ce que les employeurs ont bien compris en proposant de plus en plus souvent une telle rupture avant d’envisager un licenciement. Les licenciements économiques individuels ont ainsi été « remplacés » par des ruptures conventionnelles (ce que permet d’ailleurs la Cour de cassation). De même la Cour de cassation vient de reconnaître la possibilité de conclure une rupture conventionnelle avec un salarié en arrêt pour accident du travail (Soc. 30 sept. 2014) alors que licencier un salarié en accident du travail est quasiment impossible.

Outre le délai très court pour contester (12 mois à compter de l’homologation) les possibilités de contester une rupture conventionnelle sont de plus en plus limitées.

La Cour de cassation ne permet qu’une seule voie de contestation : le vice du consentement (Soc. 23 mai 2013, Soc. 15 janv. 2014). Ne peuvent donc pas suffire à obtenir l’annulation d’une rupture conventionnelle :

– l’existence d’un différend entre le salarié et l’employeur (Soc. 23 mai 2013), même si un entretien préalable à licenciement a précédé la signature de la rupture conventionnelle (Soc. 19 nov. 2014)

– le défaut d’information du salarié sur la possibilité de se faire assister lors de l’entretien au cours duquel sont discutées les modalités de rupture (Soc.29 janv. 2014, Soc 19 nov. 2014)

– L’absence d’information sur la possibilité de prendre contact avec le service public de l’emploi en vue d’envisager la suite de son parcours professionnel (Soc. 29 janv. 2014)

– l’erreur sur la fin du délai de rétractation (Soc. 29 janv. 2014)

 

Le vice du consentement, seule cause d’annulation d’une rupture conventionnelle, peut prendre trois formes :

– l’erreur, cause très théorique: le salarié ne connaissait pas la nature et la portée du document qu’il a signé

– le dol : le salarié a été victime de manœuvres de l’employeur qui l’ont amené à signer la rupture conventionnelle. Ex: quand l’erreur du salarié résulte de la transmission, par l’employeur, d’informations manifestement erronées (Soc. 5 nov. 2014)

– la violence (morale le plus souvent): le salarié a été contraint de signer une rupture conventionnelle, notamment pour mettre fin à une situation insupportable, comme un harcèlement ou des menaces répétées de licenciement (Soc. 12 févr. 2014)

Reste que le vice du consentement, qui doit être démontré par le salarié qui conteste la validité de la rupture conventionnelle qu’il a signée, est difficile à prouver, d’autant plus que le salarié a eu un délai de rétractation libre de 15 jours.

 

Conclusion : sauf si vous voulez partir pour  un autre poste et/ou que vous voulez éviter de faire apparaître une rupture « gênante » sur votre CV, ne signez pas de rupture conventionnelle! d’autant qu’elle n’offre pas plus de droits au chômage qu’un licenciement (rappelons que, quel que soit le motif, même la faute grave ou lourde, le licenciement ouvre droit à l’assurance chômage).

Si vous avez signé une rupture conventionnelle et que le vice du consentement est impossible à démontrer, tout n’est cependant pas perdu :

La rupture conventionnelle ne règle que la question de la rupture du contrat de travail mais pas celle de l’exécution du contrat de travail. Vous pouvez donc toujours réclamer des salaires non payées (heures supplémentaires, primes etc.) ou des dommages et intérêts pour repos compensateurs non pris, harcèlement moral, violation de l’obligation de sécurité, de formation, etc.

C’est pourquoi un employeur avisé voudra certainement vous faire signer, après la rupture, une transaction, c’est à dire un accord par lequel, moyennant une compensation, vous renoncez à tout recours juridictionnel: à vous de négocier les meilleures conditions…

 

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